"Seule sur la plage" la nuit de Hong sang-Soo



Nos commentaires après la séance au Concorde du 22 Janvier  2018

 
Claudine :
Le cinéma enchanté de Hong Sang-Soo - Liste de 7 films - SensCritique
 L'idée est donc de revisiter la partie de la filmographie de l'immense cinéaste coréen - un peu marginalisé dans la mesure où il ne travaille pas dans le polar ou le cinéma provocateur - Hong Sang-Soo, pour voir comment elle vieillit, et de compléter ma connaissance de ce cinéaste  ...

J'ai beaucoup apprécié ce film, tant pour l'univers onirique qu'il nous ouvre que pour l'interprétation des comédiennes   je n'ai pas tout compris, loin s'en faut ... des intentions de l'auteur et des questions restent en suspend ... de quelle ville européenne s'agit-il dans la première séquence du film ? pourquoi ce laveur de vitres passe-t-il autant de temps à astiquer la baie vitrée de la chambre de l'apparthôtel au bord de la mer ? et que signifie la dernière image avec ce personnage qui en porte un ou une autre sur ses épaules ?

si vous avez des réponses ... ??? 

Alain
Un film déconcertant, intriguant, composé en deux parties après la première séquence européenne sans que l'on comprenne le pourquoi de cette structure - avec un très beau final. Le spectateur doit se débrouiller pour le sens à lui donner - comme dans les autres films de Hong Sang Soo. Les personnages reviennent sur cette rencontre sans réciprocité. On pourrait dire une symétrie de la non-réciprocité des rapports qui les sépare autant que le récit qu'ils en font. Hommes et femme en prennent pour leur grade. Autant le personnage féminin que celui du réalisateur qui vient se loger dans son rêve. De même ces silhouettes de semblants d’hommes - ou de femmes - qui sont improbables. De chaque côté du tain de l'image, un monde ressemble à celui qu'il réfléchit. Les deux parties du film se rejouent à la fin sur la plage. Tout cela est-il rêvé ? Même la femme que je suis ? en tant qu'être, en tant que personnage, en tant que filmeur, en tant que spectatrice ou spectateur. Mon rêve a la substance de mon imagination, de mes sensations mais aussi et surtout d'une énigme puissante.

On tente cette énigme de la regarder en face. Celle de l'univers dont l'ouverture sur la mer est l’image. Sur la plage et dans l’appartement car cette énigme donc ne se pose qu'à partir de celle dont on filme le récit, la métaphore. Elle la rabaisse de façon très ironique dans une autodérision - celle par exemple de la baie ... vitrée. Le cinéaste en tant que nettoyeur de baie vitrée ? j’aime bien cette image insistante et drôle, la façon dont en plus le personnage vient s'allonger de façon nonchalante les pieds en avant - les doigts de pieds en en éventail pourrait-on dire - devant cet ouvert de l'univers ; ouvert barré par le nettoyeur de vitre dont on ne sait s'il est lui aussi l'un des protagonistes. C'est cette torsion qui m'intéresse chez Hong. Prendre au sérieux l’ironie de la situation y enfoncer son regard... Le grotesque des personnages - de leur récit, de leur stature de leur rencontre- ne détruit pas l'image au contraire. Chez Hong l'énigme du rapport à l’autre est clivé par nécessité entre enchantement et désenchantement. C'est dans l'exploration de cette nécessité qu'à mon avis il est grand. Un artiste se mesure à sa "nécessité". J'ai lu quelque part le mot de "maturité". Il me plait. La maturité du rapport vient quand descendant dans ce qu'il y a de plus trivial on en vient de ce fait à le sublimer, à le voir en face. Le réel est ce qu'il y a de meilleur, c'est par la fabulation que nous y atteignons.