Woman at war
Mon commentaire sur Woman at war
Un film que de ce matin encore beau je voudrai qualifier de "réaliste".
En l’espace de 10 ans nous sommes passés du déni de la réalité, à l’âpreté de son constat dans la société, comme au cinéma qui en est le reflet. D'abord dans une série de films apocalyptiques, (Take Shelter par exemple qui date de 2011), à l'offre d'alternatives documentaires sortis en salles pour ne pas se laisser abattre (En quête de sens, Demain ... il y en a une flopée, en symétrie et a proportion de la vision noire. "Avec le péril croît ce qui sauve" (Holderlin).
Un film avec de la poésie et des références aux mythes. Avec par exemple les jeux sur les doubles comme figures de la résistance, qui vaut donc par la force de sa métaphore, de ses allégories. Au départ l'affrontement de l'élément terre, la boue, la glace, l'eau au feu électrique d'une civilisation. On a pensé à Ulysse "l'homme aux mille ruses", s'enfuyant accroché sous la toison d'un bélier, s'extrayant de la fureur du cyclope aveuglé. La pierre écrase le drone qui est son oeil. Mais c'est aussi un "Léviathan" le monstre étatique conceptualisé par Hobbes. David contre Goliath. Pour ne pas se faire choper par le Léviathan étatique on nous donne la solution : du collectif en 1+1 et en jeu de miroir qui permet toutes les ruses : celle de Woman la chienne pour woman la femme. On peut jouer équipe, dans le combat la résistance (On avait aussi cette thématique dans Les combattants, avec un regard amusé ironique sur la wonderwoman écologiste survivaliste jouée par Adèle Haenel et le couple de l'avenir qu'elle finit par former). Le combat de Woman qui est aussi le nom de la chienne, nous met face à notre responsabilité individuelle, mais en rapport de solidarités, humaine, masculine, animale, végétale, minérale, élémentaire. Même celle du hasard, de celui qui par l'incidence heureuse y contribue en bouc émissaire burlesque qui prend tous les coups ( le cycliste touriste voyageur migrant dont on a besoin).
Dans le jeu des images et de miroir se joue la transmission du combat intergénérationnel , à travers les deux jumelles qui se lient au bout du monde à l'enfant de l'humanité, ukrainienne comme les enfants irradiés de Tchernobyl l'ont été. Les sœurs identiques échangent leur identités, comme les zadistes s’appellent Camille ou les postiers de Looking for Eric de Ken Loach se dissimulent derrière des masques de Cantona.
C'est un film d'homme qui affirme une puissance du féminin résolu. Phallique ? Provisoirement en la situation impénétrable, quoique momentanément abattue femme livrant sa fragilité. Là pour moi réside la pierre angulaire du film à prendre en ligne de compte le désarroi, le moment de doute, de vertige. Pour que le Djin de ce qu'il faut, de la justesse puisse s'exprimer. L'image finale est terrible (l'humanité doit cheminer de l'eau à mi-taille dans ce qui n'est même plus un chemin). La situation, ce constat qui est aussi un message, nous y force : va falloir être plus radical pour survivre. Faut trouver à vivre simple pour traverser le "compliqué" de la situation. Un arc une flèche et ce qui s'impose à chacun-e de façon juste comme ce qu'il y a à faire. La virilité s'écrit au féminin.